L'INSTANT D'AVANT
Le ciel était noir
D’un noir de jais,
Profond, épais
Pareil à l’encre d’une pieuvre,
Il plongeait dans les ténèbres
Les visages stupéfaits
Habillait d’obscurité
Formes et paysages
Les regards subitement frappés de cécité
Assistaient
Hagards,
Hébétés
Au triomphe de l’ombre sur la clarté
Il était là pourtant,
L’instant d’avant
Arrogant,
Rayonnant de puissance à son zénith
Pesant de tout son poids sur les épaules accablées
Les échines ruisselantes, brûlées
Expiant à sa chaleur,
Leurs existences de damnés
Sur le bitume fiévreux
Des silhouettes ahuries bégayaient des pas silencieux
Tandis que la radio,
Entre deux hommages obséquieux
Pleurait des chants religieux
Il était là, lui aussi,
L’instant d’avant
Suffisant
Pétri des certitudes d’un roi
De l’assurance d’être au-dessus des lois
Des promesses d’éternité
Nées d’une vie d’ivresse du pouvoir
Nul ne l’approchait
Pas un regard ne le défiait
Démiurge,
Despote,
Il était
Tout,
Sur cette portion de terre qu’il irradiait
L’instant d’avant.
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© Alain Kasanda
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