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A Sofia, sœur de cœur | Cegueira


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A Sofia, sœur de cœur


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Je marchais dans les ruelles de Porto livré à mes pensées zigzagantes quand je reconnus la voix vibrante du chanteur cubain Ibrahim Ferrer. L’auberge Taberna Porto A Noite avait ouvert toutes ses portes dans une lumière généreuse. Je décidais d’y entrer. Une grande fille longiligne m’accueillit avec un large sourire pour partager, en ce jour de dimanche, une fête spéciale de sa famille.


C’est ainsi que je fis connaissance durant cette belle journée de printemps de Sofia Murta Alves.

Je lui expliquais mon reportage sur les cafés importés au Portugal.

Elle me présenta sa mère, Maria, son père qu’elle appelait « my small big man », son fils Francisco, son Kiko, « mon petit homme à moi », ajoutait-elle, l’œil espiègle et sa tante, une femme fantastique, paraît-il. « Avec ma mère et ma tante, voici les trois mousquetaires de la taverne devant vous » prêtes à servir un repas bien mijoté dans la tradition des cuisinières portugaises de plus en plus rares.

Très vite, je compris que ses parents avaient travaillé dur pour élever leur fille et l’envoyer à l’école française.

Un après-midi entier pour parler de Porto, de son port, du fleuve le Douro, de musiques, de chants. Kiko s’était mis en retrait pour voir le match de foot avec Porto, son club préféré.

Sofia écrivait déjà de la poésie.

« Je crois aux gens qui ont beaucoup de lumière en eux comme ma mère la bien nommée Maria de Luz », disait-elle, en ajoutant « les sourires nourrissent l’âme parce que chacun de nous a sa propre histoire. Ouvrez vos cœurs et reprenez courage ».

Un mot que Sofia aimait beaucoup : Gratitude


« Peu importe le peu qu’ils pensent,

pour moi c’est beaucoup,

et le peu que tu laisses derrière toi,

c’est le plus aimé par moi ».


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A un moment, le torréfacteur des sardines du port, un vieil ami du père arriva dans la

taverne avec son accordéon pour accompagner le chant de la mère de Sofia « sa belle

gardienne » dans une poignante improvisation de fado.

Avant de nous quitter, Sofia me montra des photos de sa région préférée, le Tras os Montes, au nord-ouest du pays et en particulier la photo d’un puits caché dans les arbres sur le sol battu. « C’est là que je viens quand le cœur est gros ». Sofia aimait ce monde flottant du Tras Os Montes, ces paysages ambulants d’où les rapaces tournoient en silence entre les falaises de schiste plongeant dans le Douro près de la frontière avec l’Espagne.


Il était temps de partir. Le jour déclinait. Sofia allait rejoindre son lieu de travail,

l’aéroport de Porto.

La Taberna Porto A Noite près du fleuve était le chaudron de sa famille, le point fixe de rassemblement de ses amis, le cœur de son projet de Taberna littéraire où poètes et

écrivains viendraient se retrouver.


« J’ai des racines fortes qui me tiennent. J’ai beaucoup à grandir, beaucoup à voir. Je

résiste toujours. Ce ne sont pas les nuages qui vont m’empêcher d’être ce que je dois

être ».

« Il faudra que tu reviennes », me dit-elle avant mon départ. Avant de continuer mon

chemin, Sofia glissa dans mon bagage un petit sac de grosses cerises.


Depuis notre rencontre, Sofia m’envoyait des petits signaux de connivence pour les

anniversaires, les fêtes, la parade traditionnelle du port sur le Douro. Sa grande joie fût de voir en août 2019 son poème A VIDA publié dans le blog poesiarevelada.com dans sa langue, le portugais traduit par Hervé Hette, auteur d’une belle photo qui lui ressemblait tant.

« Ton humanité poétique me va droit au cœur », lui écrivît un lecteur.

Sofia se retrouvait bien dans Poesiarevelada, un blog ouvert aux rythmes et aux sons d’une poésie libre venue de langues différentes.


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« Trouve ton chemin, lui disais-je et ne t’arrête pas ». Je relis A VIDA, ton poème écrit

comme une sourde plainte pour cacher tes blessures intimes.

« Crie si fort que les mouettes dans la mer s’envolent comme des folles,

que les feuilles des arbres sentent l’automne et tombent au sol,

Pleure avec le cœur mais sourit avec l’âme,

la vie est comme ça ».

Sofia était une femme de courage « des pierres solides me tiennent au sol tellement

résistantes que même les vents ne pourront pas les emporter ».

Autre petit message,

« N’aies pas peur. Dans la clarté, il y a toujours de la vérité ».

Ou encore ces quelques frémissements qui touchent de près ton être sensible

« Dans les veines de mon corps et dans la lumière de mon âme,

je trouve toujours la meilleure partie de moi ».

Jusqu’au bout, j’ai encouragé Sofia à ne jamais quitter l’écriture.

« Ne t’arrête pas, la poésie ça peut sauver la vie à un moment d’abandon », lui dis-je.

Sofia m’accepta comme ami après seulement quelques heures de rencontre.

« Quand tu as de grands amis, de bonnes choses arrivent », disait-elle souvent.

Un dernier message arriva pour mon anniversaire,

« Ce n’est pas dur de mourir dans cette vie.

Vivre est beaucoup plus difficile,

Ne regarde pas en arrière.

Bisous, taille mondiale pour toi ».


Merci, Sofia, pour ton énergie, ta lumière contagieuse et ton courage

J’écoute désormais ton chant. Il est le vif de la vie comme ce poème dédié aux vingt ans de ton « prince » ton fils chéri,


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« Aime chaque instant comme une brise légère

et laisse là te porter

sans crainte de te perdre

et sans crainte de t’abandonner

la vie t’attend ».


Vivante est ta voix de femme jeune accompagnée dans le silence d’une nuit à Porto.

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© Thierry Quintrie Lamothe

Récits/Poèmes

Paris, novembre 2025 Photo : © Sofia Murta Alves


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Cegueira


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Residentes num inferno sem querer,

Malditos os que nos conduzem para um abismo suspenso,

degrau a degrau na escuridão,

num sono leve fechado e sem sol.


Estamos atados com fios invisíveis numa estrada interminável,

Sendo levados inconscientes e vazios,

colados a pensar que inteiros somos,

é só o que sabemos ser.


Gente cega e pequena,

repleta de ignorância alimentada a pó

a voar num céu que se faz arena,

rodeados de gente e sempre sós.


Caminhamos no deserto onde uma pedra vira montanha,

qualquer gota de água um mar imenso,

onde angústia vira guerra,

e o amor tormento.


Corremos sem sentido

Sem bússola que nos guie,

Cheios de sede de mundo,

Mas com almas cheias de nada,

Presos a fins sem princípios,

Presos a histórias sem inícios,

A sentimentos ocos, a visões cegas,

A vidas pobres, a eterna solidão.


Abre os teus olhos e vê o plano que lá se fez,

Coberto de cinza que o vento levará,

O sol espreita numa manta feita de lã

Cozida com retalhos que vais fazendo,

Com os fios que te restam

repleta de pequenos remendos,

não queiramos ser invólucros vazios,

sejamos plenos e inteiros,

o que era planeado sempre ser.


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Poema de Sofia Murta Alves Ilustração de Tierri Luís https://www.instagram.com/tierriluis/


 
 
 

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