Ça commence comme une flânerie légère
tes pas qui te portent à travers la ville
dessinent un territoire
d’invisibles traces
inventant une topographie
Ça commence par
marquer physiquement
frapper la terre le bitume
arpenter faire le tour presser le dédale de tes
plantes de pieds
C’est dans le corps que ça se passe
dans ton corps
tes pieds
et puis
l’oeil
s’approche
capture des formes des couleurs des textures
transmet le message
Au début c’est léger
et puis
ça descend ça fait le chemin ça s’imprègne
alors
ta main tes doigts
l’extrémité de ton ongle
en partant du bord
soulève
un peu juste un peu
ça colle ça adhère
tu invites
tu utilises l’ongle
tu grattes
ça attache ça ne vient pas
tu ne lâches pas
tu grattes encore
tu ouvres une brèche fine
tu t’écartes
avec le bout de ton ongle
ça vient
Alors
tu t’y mets tout entier
de tout ton corps
de toute ta force
jusqu’au cou
tu déchires
Dessous
autre chose
des taches de résidus des morceaux
Tu respires un grand coup
Sur le mur
autre chose
Dans tes mains autre chose
et demain
tu reconstitueras l’île
ton île
Collages de Philippe Pons
Texte de Cati Roman
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C’est en 1982 alors jeune étudiant aux Beaux-Arts de Toulouse que je m’initie à la pratique du collage grand format.J’arrache alors de grands blocs d’affiches accumulés sur les murs de la ville puis, dans l’atelier de l’école, je les recouvre complètement d’une couche de peinture tourbillonnante qui, à la façon de la gestuelle de Van Gogh, semble inonder ce support trivial d’une lumière nouvelle.
Une fois ce travail réalisé, je déchire en lambeaux la couche de peinture laissant apparaître cette fois les lettres et les fragments d’image ressurgis d’un passé lointain.Vingt ans après mes premières oeuvres, je confectionne à nouveau le même genre de collage mais ce qui a vraiment changé dans ma démarche, c’est la quête d’images beaucoup plus diversifiées car j’arrache des lambeaux d’affiches aux quatre coins de la planète.
Mon idée est de matérialiser une sorte de langage universel fait d’un brassage de plusieurs langues, qui représente pour moi ce que nous vivons au quotidien, c’est à dire la confrontation brutale de divers univers hétéroclites.
Ces affiches collectées au cours de mes voyages sont retravaillées dans mon atelier de Peyzac Le Moustier. J’imagine, après cette récolte, un dialogue entre lettrisme et peinture, savant mélange de poésie et d’expressions plastiques.Ces créations, collages/peintures, fruit du jeu entre signes et coulures, grands aplats et fines couches de carton, symbolisent le chaos du monde, un tour du monde du langage, des langues, des cultures qui s’entrelacent et se chevauchent. Du street art à ma façon car la rue imprègne et influence ce travail que je réalise finalement dans mon atelier.
A la façon d’une œuvre complète entre collage/peinture et street art, chacun peut y trouver son histoire, l’expression d’un monde contemporain fait de chocs visuels et d’émotions, une partition musicale d’un chaos qui crée de la beauté.
Philippe PONS
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